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Chic,choc et charme



jeudi 19 avril 2012

AVENUE DES GEANTS VUE PAR LE FIGARO

Photo le Figaro



Marc Dugain s'est inspiré de l'histoire de Edmund Kemper, un tueur en série américain. Un roman percutant et perturbant.

En 1959, l'Américain Robert Bloch publiait Psycho, l'histoire de Norman Bates, un garçon très perturbé après avoir proprement dessoudé et empaillé sa mère abusive. Trente ans plus tard, Bret Easton Ellis créait un séisme de forte intensité en publiant American Psycho, récit des exploits d'un golden boy massacreur misogyne nommé Patrick Bateman. Encore trente plus tard, alors que les serial killers n'intéressent plus que les séries télé américaines, Marc Dugain s'en empare. Ce qui n'est pas illogique au vu de son parcours: de La Chambre des officiers (1998) à Une exécution ordinaire (2007), en passant par La Malédiction d'Edgar (2005), il s'est toujours passionné pour les monstres.

Aujourd'hui, il se met dans la tête du plus grand d'entre eux, Edmund Kemper, 2,10 m pour 130 kg, enfermé à vie pour le meurtre d'au moins huit personnes dont ses grands-parents paternels. Et celui de sa mère, dont les policiers ont retrouvé en avril 1973 la tête posée sur la cheminée de sa maison piquée de fléchettes. Le détail des exactions du géant n'est pas racontable. Des livres et des films ont été tirés des aveux de ce garçon bavard dont le QI serait supérieur à celui d'Einstein

Dans Avenue des géants, très beau titre pour un sujet laid, Ed Kemper est devenu Al Kenner. Il mesure 2,20 m mais, dans les grandes lignes, le roman est fidèle à l'histoire réelle. Un gamin traumatisé par le divorce de ses parents et les mauvais traitements infligés par sa mère déséquilibrée. Un garçon qui a pris l'habitude de décapiter les animaux et a connu son premier orgasme dans une fête foraine en voyant une belle blonde tuée par une fausse guillotine. Après avoir passé cinq ans en hôpital psychiatrique, Al sera décrété «sain d'esprit» et libéré. Il voudra s'engager dans l'armée, comme papa, ex-membre des forces spéciales - mais sa taille sera un motif de rejet. Entre deux virées à moto sur les routes de Californie, ses seuls moments de bonheur, Al jouera les conseillers-profileurs pour le chef de la Crim de Santa Cruz, qui s'appelle Duigan (anagramme de Dugain) et lui confie sa fille…

L'ogre des contes de fées
Décidément, Dugain a le chic pour trouver des sujets chocs. Et les détourner. Ici, plus que l'histoire d'un détraqué, c'est l'autopsie d'une Amérique des années 1960-1970 en pleine révolution qui le fascine. Cette époque bizarre où le meurtre est légal au Vietnam et où ceux qui reviennent de l'enfer sont brisés, suicidaires ou dangereux. Al, lui, se pense du côté de l'ordre. Il vomit les hippies, les chevelus, les filles riches et criardes comme maman. Sa mère le traitait d'éléphant de mer et de tapette. Il l'a entendue dire: «Je suis la première femme à avoir fait une fausse couche menée à son terme.» On a l'habitude de dire que le tueur en série moyen est ­M. Tout-le-Monde, le voisin d'à côté. Ici, c'est l'ogre des contes de fées. Mais le surdoué Dugain évite le Grand-Guignol et on suit son géant avec, en tête, Jim Morrison qui fredonne: «There's a killer on the road»…

«Avenue des géants», de Marc Dugain,Gallimard, 361 p., 21,50 €

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